lundi 16 décembre 2019

Comeback à Tübingen. Exposition



COMEBACK. Kunsthistorische Renaissance, Kerber Art, Kunsthalle Tübingen, 150 p. Werkliste pp.143-149

L'ouvrage concerne l'exposition qui se tient à Tübingen, en Allemagne. L'exposition rassemble une centaine d'oeuvres d'une trentaine d'artistes contemporains qui font revivre à leur manière, dans leurs propres tableaux, des tableaux plus ou moins célèbres.

Ainsi Christian Jankowski fait revivre Un Atelier aux Batignoles de Henri Fantin-Latour (1870). Yinka Shonibare CBE en 2011 reprend le Morte de São Francisco (1593, Bartolemeo Carducho) : s'il conserve bien sûr la disposition des personnages, ce ne sont plus toutefois des religieux ; quant au personnage central, il s'agit désormais d'une femme, belle et élégante, qui tend au mourant une mince bougie (Fake Death Picture, 2011). Le même modèle pose d'ailleurs, avec le même costume pour une mort de Chatterton, le poète anglais dont Alfred de Vigny fit un héros romantique.

Le tableau 3 mai 1808, de Francisco Goya est repris par Jose Manuel Ballester dans un tableau intitulé 3 de Mayo 2008 dans lequel ne restent plus, dans le même cadre, que les traces à terre des vêtements des condamnés : les soldats du peloton d'exécution et les condamnés ont disparu mais l'on voit le lieu du crime parfaitement, avec les bâtiments et l'église en arrière-plan. Le tableau de Léo Caillard (en couverture du livre), Hipster in stone XII modernise une statue célèbre en lui ajoutant un smartphone, un T-shirt sous la toge et les lunettes de soleil ; ces accessoires raniment un héros ancien, impérial, alors que de son geste, il prend un selfie.
Ce sont de véritables appropriations que montrent les tableaux de lza Lou (The damned, 2004) ou Christian Jankowski qui reprend et modernise un Matisse (Neue Malerei, Matisse II 2018) où une danseuse fait bien voir ses chaussures (ce sont des Nike), un Cranach ou un David, un Rembrandt, un Van Gogh... Le tableau d'Henry Wallis (1856) qui montre le poète Thomas Chatterton qui s'est suicidé très jeune : la bouteille d'arsenic est au premier plan, comme dans le tableau original, est repris par Yinka Shonibare CBE. Seuls quelques éléments de la mise en scène ont été modifiés : le costume, la fenêtre qui ne donne sur rien alors qu'elle donne sur des bâtiments de Londres dans le tableau imité, la fleur en pot bien plus discrète sur la fenêtre...

Toutes ces révisions de tableaux célèbres donnent à revoir à des spectateurs modernes, actuels, les tableaux anciens (comeback) et invitent à y réfléchir. Non sans ironie. Les oeuvres les plus célèbres de l'histoire de la peinture sont ainsi mises à jour, et leur imitation leur fait dire bien d'autres choses que l'original... Mais dans combien de temps faudra-t-il les reprendre alors que l'on se saura sans doute plus ce qu'est un smartphone, un selfie ?

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