mardi 12 octobre 2021

La peinture dont on ne parle plus guère : Jean Bouchaud

 Jean Bouchaud : Regards sur le monde 1891 - 1977, Ville De Boulogne-Billancourt, 2021, 160 p. Bibliogr., 20 €

C'est un peintre bien peu connu aujourd'hui, qui a peint les colonies françaises, de l'Afrique noire au Maghreb, en passant par l'Indochine. Mais il a peint aussi la vie catholique de sa Bretagne natale. Pour les colonies, il est de toutes opérations, y compris les bateaux transatlantiques, les expositions.
L'exposition à Boulogne, au Musée des Années 30, donne à voir des oeuvres de Bouchaud, de très nombreuses oeuvres, sur différents supports.
Ce peintre né dans une milieu catholique, une famille nombreuse dont un des frères est prêtre catholique et l'une des tantes est religieuse, a sur le monde dans lequel il vit une vision plutôt conservatrice. Il ne dénonce pas, il énonce, sans approuver manifestement.
Peintre colonial, il travaille à la publicité de l'Afrique Occidentale Française, des Messageries Maritimes, pour le transatlantique Normandie ; il travaille à un calendrier aussi. Bouchaud collabore à l'Exposition coloniale, à l'Exposition internationale de Paris (1937) également. Pour le magazine hebdomadaire L'Illustration, il produit fréquemment des illustrations. On le verra en Chine également.
Que fait Jean Bouchaud pendant la guerre ? "Peintre officiel et reconnu, il participe comme de nombreux artistes à la vie culturelle de l'époque'", note discrètement (ou distraitement) Erika Boucher (p. 118). Faut-il comprendre que, "comme de nombreux artistes", il collabore à la politique culturelle du gouvernement de Pétain ? 
En 1953, Jean Bouchaud est encore retenu pour la décoration du lycée de filles qui deviendra le lycée Claude Monet et pour un autre établissement aux Antilles... Mais l'on n'apprendra peu, presque rien sur sa vie personnelle. Dommage.

L'exposition est d'une incontestable qualité et l'on est amené à voir le peintre au service de la société coloniale, dont on ne sait s'il l'approuve ou non. Mais ce n'est pas le problème, pas encore. Il aura passé beaucoup de temps en voyage, laissant à son épouse le soin de la famille. Le livre et l'exposition donnent à percevoir ses "regards sur le monde". Mais qu'a-t-il vu ? Nous voyons ce qu'il a retenu, ce qu'il veut retenir, en touriste. Comme bien d'autres intellectuels à son époque. Et cela aurait bien mérité quelques pages aussi.