500 expressions françaises bien décortiquées
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On les a toutes, ou presque toutes, déjà lues ou entendues. Sans toujours
en connaîtr...
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lundi 24 mars 2014
Concevoir les design d'une vie multi-device
Michal Levin, Designing multi-device experiences. An ecosytem approach to user experiences across devices, O'Reilly, Index, 2014, 328 p., 26,81 $ (édition Kindle)
Le monde de nos outils numériques est multiple. Dès lors, comment concevoir des réalisations adaptéees à des outils différents, coordonnés et synchonisés : smartphones, phablets, tablettes, ordinateurs, téléviseurs, DOOH ?
L'auteur, spécialiste du design, travaille chez Google (Senior User Experience Designer), propose la notion d'"écosystème d'outils connectés" et de"multi-device design". Selon elle, la clé de la réussite se trouve dans l'adaptation au support, d'où la métaphore du beau caméléon sur la couverture de l'ouvrage. Mais la difficulté provient de la multiplicité des supports et des O.S., multiplicité qui oblige à concilier les optimisations locales, appareil par appareil, avec l'optimisation totale de l'expérience utilisateur (User experience, UX). Comment passer du responsive web design (RWD), premier degré de l'optimisation, qui fait que le design d'un site Web s'adapte automatiquement à tout écran (CSS3), à une adaptabilité généralisée aux appareils, au-delà des écrans.
Michal Levin caractérise trois approches du multi-device design : consistant, continu et complémentaire. Consistant renvoie à la constance inter-produits du design, observable, par exemple, dans Google Search ou Hulu Plus ; cette approche ignore toutefois les contextes de chaque expérience. Continu renvoie à la successivité coordonnée des opérations conduites avec plusieurs appareils, d'un appareil à l'autre (exemples : Pocket, Kindle). La complémentarité naît des interactions entre appareils, fonctionnant ensemble, comme orchestrés (exemples : jeux vidéo, écrans de l'expérience télévisuelle). Chacune de ces propriétés est illustrée de très nombreux exemples, convaincants, clairement développés. Puis vient le moment final de l'intégration optimisée de ces trois types de design.
Après, l'auteur s'éloigne du strict éco-système des appareils pour élargir son approche à des ensembles d'objets plus vastes : Internet des Choses et domotique (Nest, BiKN, Square, Smartthings), Quantified Self et Wearable notamment (Nike+, Pebble), réalité augmentée (catalogue Ikea).
Enfin, vient le moment des multi-device analytics. Comment évaluer la réussite d'un écosystème (Google Analytics, A/B testing) ? Comment dégager, à partir de ces évaluations, des informations sur les comportements des utilisateurs ? Comment gérer la collecte de data : plus d'appareils signifie beaucoup plus de données.
L'expérience d'un écosytème multi-device constitue un changement radical dans les expériences humaines des outils. Les utilisateurs sont inondés de versions, d'applis qui complexifient et déroutent les apprentissages. D'autant que les appareils et leur design (ergonomies) créent des habitudes, des gestes, des réflexes (affordance), des souplesses aussi, notre esprit s'adaptant à la manière du "responsive web design" (RWD), plus ou moins bien.
L'ouvrage de Michal Levin est bien réalisé ; il est de lecture et de consultation commodes sur un e-reader : le sommaire détaillé est facile à suivre, les liens systématiques facilitent l'accès aux exemples, aux notions (index), aux sites et aux travaux évoqués. C'est un bon outil de travail et de documentation.
En revanche, la mise à jour proposée par l'éditeur (O'Reilly) coûte $4,99 ; c'est exagéré. Expérience utilisateur ratée.
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samedi 26 octobre 2013
Gestion du divertissement : la stratégie du blockbuster
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Anita Elberse, Blockbusters. Hit-making, Risk-taking, and the Big Business of Entertainment, Henry Hol & Company, New-York, $ 12,74, 320 p., 2013, Index.
Professeur de marketing à Harvard, Anita Elberse étudie et expose - et raconte aussi - les raisons de l'efficacité des blockbusters. Elle montre que le passage de l'analogique au numérique ne change rien à la logique des grands succès dans l'économie et la gestion du divertissement. Au contraire : de plus en plus de produits (musique, DVD sur Netflix, vidéos sur YouTube, livres, jeux vidéo) sont consommés à un faible nombre d'exemplaires tandis que les ventes se concentrent sur quelques titres, sur quelques personnes : c'est le contraire de l'effet escompté de la "longue traîne" qui devait faire vendre moins d'unités de beaucoup plus de titres : Chris Anderson, The long tail. Why the Future of Business is Selling Less of More, 2006.
Pour sa démonstration, Anita Elberse s'intéresse au cinéma, au show-business (Lady Gaga, Tom Cruise, Maroon 5, Jay-Z), à l'édition et même à la distribution numérique des opéras (le Met de New York) ; elle traite aussi beaucoup du sport : du football (Real Madrid, Beckham, NFL), du tennis (Shaparova), du basket (LeBron), du baseball (MLB), etc. De ses nombreuses et diverses observations, elle conclut qu'il vaut mieux tout miser sur un film ou un livre dans l'espoir de produire un énorme succès - quitte à risquer de tout perdre - plutôt que répartir son investissement entre divers projets de moindre ampleur (i.e. diversifier son portefeuille). Dépenser davantage sur moins de produits : la stratégie marketing du blockbuster (tente-pole strategy) s'oppose à celle dite de gestion pour les marges (managing-for-marges) qui a vu échouer lourdement le network NBC ; elle s'avère toujours la plus efficace dans la gestion du divertissement. Cette proposition est issue d'observations réalisées sur les dix dernières années, et vérifiées sur des cas plus récents ; elle va à l'encontre des clichés du marché : plus de canaux de télévision ont provoqué, non pas une fragmentation de l'audience, comme l'on s'y attendait mais une concentration. De même, iTunes qui met à disposition largement vend étroitement. Netflix suit le même modèle, Hulu aussi...
Anita Elberse, Blockbusters. Hit-making, Risk-taking, and the Big Business of Entertainment, Henry Hol & Company, New-York, $ 12,74, 320 p., 2013, Index.
Professeur de marketing à Harvard, Anita Elberse étudie et expose - et raconte aussi - les raisons de l'efficacité des blockbusters. Elle montre que le passage de l'analogique au numérique ne change rien à la logique des grands succès dans l'économie et la gestion du divertissement. Au contraire : de plus en plus de produits (musique, DVD sur Netflix, vidéos sur YouTube, livres, jeux vidéo) sont consommés à un faible nombre d'exemplaires tandis que les ventes se concentrent sur quelques titres, sur quelques personnes : c'est le contraire de l'effet escompté de la "longue traîne" qui devait faire vendre moins d'unités de beaucoup plus de titres : Chris Anderson, The long tail. Why the Future of Business is Selling Less of More, 2006.
Pour sa démonstration, Anita Elberse s'intéresse au cinéma, au show-business (Lady Gaga, Tom Cruise, Maroon 5, Jay-Z), à l'édition et même à la distribution numérique des opéras (le Met de New York) ; elle traite aussi beaucoup du sport : du football (Real Madrid, Beckham, NFL), du tennis (Shaparova), du basket (LeBron), du baseball (MLB), etc. De ses nombreuses et diverses observations, elle conclut qu'il vaut mieux tout miser sur un film ou un livre dans l'espoir de produire un énorme succès - quitte à risquer de tout perdre - plutôt que répartir son investissement entre divers projets de moindre ampleur (i.e. diversifier son portefeuille). Dépenser davantage sur moins de produits : la stratégie marketing du blockbuster (tente-pole strategy) s'oppose à celle dite de gestion pour les marges (managing-for-marges) qui a vu échouer lourdement le network NBC ; elle s'avère toujours la plus efficace dans la gestion du divertissement. Cette proposition est issue d'observations réalisées sur les dix dernières années, et vérifiées sur des cas plus récents ; elle va à l'encontre des clichés du marché : plus de canaux de télévision ont provoqué, non pas une fragmentation de l'audience, comme l'on s'y attendait mais une concentration. De même, iTunes qui met à disposition largement vend étroitement. Netflix suit le même modèle, Hulu aussi...
Les économies d'échelle, au travers de l'achat d'espace publicitaire nécessaire au lancement des produits de divertissement, accentuent l'intérêt des blockbusters, de même que l'internationalisation des marchés du divertissement ou, sur un autre plan, celle des réseaux sociaux mondiaux. L'économie des blockbusters favorise la répétition et les positions acquises : genres de films (vampires, super-héros masculins), acteurs, sportifs ou chanteurs à succès... Stars à temps plein, people, "celebrities" ! Ce conservatisme rencontre et renforce le conformisme des spectateurs, téléspectateurs, lecteurs...
L'auteur semble prendre peu de distance avec le milieu qu'elle analyse, sa culture, son idiome, ses valeurs. Elle éprouve sympathie et admiration pour le monde qu'elle observe, qui constitue son terrain (field) ; elle n'est certes pas "en colère contre l'air du temps". Elle décrit sans intention de dénoncer, approfondit des cas. On n'est pas loin d'une approche ethnologique.
Au plan épistémologique, l'ouvrage n'évoque pas, et c'est regrettable, les effets induits par la quantification, la comptabilisation continue du succès où s'illustrent notamment les réseaux sociaux (nombre de fans, de suiveurs, etc.) et les médias (Billboard, Variety, etc.). On attendrait ici des références à Gabriel Tarde, ni évoqué ni cité (ethnocentrisme des sciences de gestion américaines ?) : Tarde réclamait une science des "intérêts passionnés", une psychologie économique des loisirs, soulignant que "dans l'emploi de ses loisirs, comme dans l'exercice de son travail, l'homme est imitatif." (Psychologie économique, Tome premier, 1902). Cette psychologie économique et la logique de réduction des coûts de transaction convergent dans le sens des blockbusters. Pourquoi ?
L'auteur semble prendre peu de distance avec le milieu qu'elle analyse, sa culture, son idiome, ses valeurs. Elle éprouve sympathie et admiration pour le monde qu'elle observe, qui constitue son terrain (field) ; elle n'est certes pas "en colère contre l'air du temps". Elle décrit sans intention de dénoncer, approfondit des cas. On n'est pas loin d'une approche ethnologique.
Au plan épistémologique, l'ouvrage n'évoque pas, et c'est regrettable, les effets induits par la quantification, la comptabilisation continue du succès où s'illustrent notamment les réseaux sociaux (nombre de fans, de suiveurs, etc.) et les médias (Billboard, Variety, etc.). On attendrait ici des références à Gabriel Tarde, ni évoqué ni cité (ethnocentrisme des sciences de gestion américaines ?) : Tarde réclamait une science des "intérêts passionnés", une psychologie économique des loisirs, soulignant que "dans l'emploi de ses loisirs, comme dans l'exercice de son travail, l'homme est imitatif." (Psychologie économique, Tome premier, 1902). Cette psychologie économique et la logique de réduction des coûts de transaction convergent dans le sens des blockbusters. Pourquoi ?
Les conclusions de cet ouvrage peuvent-elles être étendues à d'autres domaines, aux stratégies marketing d'autres marques ? L'auteur le pense, évoquant le cas d'Apple, de Victoria's Secret ou de Burberry dont la culture commerciale s'apparente à celle des entreprises de loisirs numériques ; cela vaut aussi pour Red Bull, pour Starbucks, etc. Le numérique permet la transformation du business des marques et de leur marketing en show business. Triomphe de la "société du spectacle" (Debord) ou de la "classe de loisir" (Veblen) ? "There is no business like show business..." : la conclusion s'imposait.
Le livre est agréable. On ne s'ennuie pas. Danger ! Ensuite, il faut le relire pour le désenchanter.
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Le livre est agréable. On ne s'ennuie pas. Danger ! Ensuite, il faut le relire pour le désenchanter.
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mercredi 13 octobre 2010
Citoyens du monde de seconde classe
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On peut lire, sur le site de l'un de ces ouvroirs qu'Internet secrète, que l'on vit désormais dans des "pays numériques" ("We No Longer Live In Actual Countries But Digital Ones"). Affirmation qui emprunte à la Carte du Village de Tendre et au "village mondial" : à Mademoiselle de Scudery pour l'euphémisation "précieuse" des relations internationales, à M. McLuhan pour la mondialisation par les technologies de communication.
Internet n'a pas atténué les notions de nation et de frontières mais les a plutôt renforcées en les rendant moins visibles. Rien n'a changé depuis la poste, les octrois et les douanes. La fiscalité des Etats règne sur Internet comme ailleurs, les réglementations nationales s'y épanouissent et l'on s'y soumet. Les adresses IP assignent à résidence ceux qui se croyaient citoyens du monde numérique. Allez donc, en Europe, utiliser Hulu ou quelque autre site de télévision étrangère, impossible. Interdit. Apple précise pour ses utilisateurs : "The iTunes Store, iBookstore, and App Store are available only to persons age 13 or older and in the U.S.". Allez donc configurer Google pour une adresse dans un pays autre que celui où vous trouver au moment où vous effectuez une recherche ; c'est impossible ("You can only specify a location in the country of your current Google domain"). Et le topos de Google d'expliquer que c'est pour notre bien : "Google knows best". Le ciblage se cale automatiquement sur les langues et les adresses IP : l'annonceur de "votre pays" vous suit sur les sites étrangers, se substituant aux annonceurs d'origine. Il faut de plus en plus d'énergie sur Internet pour être et penser comme à l'étranger.
La Sainte Alliance des très grandes entreprises américaines d'Internet, prétendument mondiales, échappent à la fiscalité des pays qu'elles investissent (optimisation fiscale) mais renoncent à être internationales pour n'être que pluri-nationales pour être efficaces commercialement. Comme la télévision et la presse, Internet gère ses "débordements frontaliers" et abandonne toute prétention mondiale.
Internet déçoit beaucoup d'espérances, d'illusions interculturelles et internationalistes.
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La Sainte Alliance des très grandes entreprises américaines d'Internet, prétendument mondiales, échappent à la fiscalité des pays qu'elles investissent (optimisation fiscale) mais renoncent à être internationales pour n'être que pluri-nationales pour être efficaces commercialement. Comme la télévision et la presse, Internet gère ses "débordements frontaliers" et abandonne toute prétention mondiale.
Internet déçoit beaucoup d'espérances, d'illusions interculturelles et internationalistes.
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