Une bataille de l'écriture manuelle (Handschrift, calligraphie) se déroule en Allemagne. Quelle écriture faut-il enseigner, selon le niveau scolaire (primaire, secondaire) ? Le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung (FaZ) rend compte à la une d'un conflit politique qui se déroule actuellement à Hambourg et de son inscription dans l'histoire de la culture allemande.
Pour simplifier : les partisans d'une écriture scripte (unverbunden, Druckschrift) s'opposent aux partisans d'une écriture en lettres attachées, cursive (verbunden, Ausgangschrift), plus rapide. Question diablement politique : en 1941, Hitler avait imposé le passage à une écriture scripte avec un alphabet dit latin (Normalschrift) ; l'écriture alors usuelle, héritée du gothique, dite Sütterlin (du nom de son auteur), étant déclarée "juive" (circulaire du 3 janvier, signée Martin Bormann !).
L'enjeu du débat actuel est considérable ; de son issue dépendent :
- les dépenses d'éducation : manuels à réimprimer, éventuellement,
- la réussite scolaire des élèves ballottés, au gré des classes, d'une écriture à l'autre,
- la difficulté globale de lecture des écritures cursives (aux examens, par exemple)
- la performance des logiciels de lecture automatique : lecture automatique de document (LAD) et reconnaissance optique de caractères (OCR).
Cette bataille scolaire a un air gentiment anachronique (cf. supra, l'illustration de la FaZ) alors que les élèves utilisent de plus en plus des outils d'écriture non manuscrite (ordinateurs, smartphones, etc.). Il n'en est rien. Quel statut prend le manuscrit dans une société à typographie numérique dominante ? Il ne disparaît sans doute pas, la fameuse victoire de Gutenberg est loin d'être totale ! Un paradigme ne se substitue pas à un autre, il l'englobe, en redéfinit la place.
Le marketing continue, par exemple, de recourir à des journaux d'écoute ou de pratiques média manuscrits (diary) pour des enquêtes. Le manuscrit, rigoureusement analysé et exploité, n'est-il pas au numérique "dactylographié", comme le quali au quanti (cf. la défense du manuscrit, par Tim Ingold) ? L'écriture manuscrite est révélatrice de la personnalité, d'un style (graphologie, calligraphie)...
Des applis sont développées permettant d'écrire avec un doigt ou avec un stylet sur un téléphone ou une tablette (cf. Penultimate Evernote), qu'il s'agisse de l'écriture de langues alphabétiques ou du chinois, etc. On peut aussi dicter grâce à la reconnaissance vocale (Dragon, applis intégrées dans les smartphones, les tablettes, les ordinateurs, etc.).
Comme toujours, l'histoire des médias resurgit à cette occasion et l'histoire culturelle et commerciale de l'Europe est reparcourue par le débat des écritures manuscrites. Le débat réveillé aujourd'hui à Hambourg s'étendra assurément à toute l'Europe. Aux Etats-Unis, la place de l'écriture cursive est en discussion dans la pluparts des Etats (certains s'en tientraient à l'écriture scripte). Dans de nombreux Etats, l'apprentissage de l'écriture cursive a été abandonné tandis que celle de la dactylographie devenait obligatoire. En Grande-Bretagne, une enquête de Docmail (2014) confirme la régression de l'écriture manuscrite.
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Je me souviens que, dans ma première année au lycée, on avait le choix entre l’écriture cursive et l’écriture scripte pour écrire les devoirs en classe. J’étais trop excitée à finalement pouvoir remplacer l’écriture cursive par l’écriture scripte. Aujourd’hui, je questionne un peu l’utilité d’apprendre encore l’écriture cursive à l’école, car de nos jours et surtout en ligne, on ne rencontre que l’écriture scripte. Les nouvelles générations dites „digital natives“ grandissent avec les médias sociaux et d'infinis innovations en ligne et comme ça ils s’accomodent à l’écriture qu’ils voient là. Mais pas seulement les médias en ligne, aussi les journaux et les livres n’utilisent que l’écriture scripte. Plus simplement dit: l’usage de l’écriture cursive est devenu rare est il sera difficile de la trouver encore une place dans le monde d'aujourd'hui.
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