Entrer dans la carrière universitaire. Pour n'en plus sortir ? Pierre
Bourdieu
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Victor Collard, *Genèse d'un sociologue*, Paris, CNRS éditions, 2024,
Index, Bibliogr., 447 p.
De son enfance lycéenne aux débuts de sa carrière univers...
lundi 28 décembre 2015
Des goûts et des couleurs que l'on perçoit
Michel Pastoureau, Les couleurs de nos souvenirs, Editions du Seuil, 2010, en collection de poche, Points, 2015, 269 p. Bibliogr., Index.
De gustibus et coloribus non est disputandum. On l'a ânonné en latin, mais Michel Pastoureau ne l'entend pas de cette oreille : il ne cesse de disputer et discuter des couleurs. Son ouvrage est une autobiographie dont chaque événement se rapporte à une expérience personnelle des couleurs. C'est aussi une sorte un roman agréable à lire qui invite à voir les couleurs du monde, et nous en fait voir de toutes les couleurs.
L'auteur, chartiste de formation, latiniste, passionné d'héraldique (blasons, armoiries), a consacré sa vie de chercheur et de Professeur aux couleurs (histoire sociale des couleurs). Il a écrit de nombreux ouvrages sur l'histoire et la symbolique des couleurs et notamment sur le bleu et le noir.
D'anecdote en anecdote, loin de Newton et de Goethe, de la physique et de la chimie, Michel Pastoureau passe en revue les couleurs de sa vie. Ainsi du Tour de France et des couleurs des maillots "souillés d'inscriptions publiciaires" loin des couleurs franches et unies des débuts, ou des couleurs des drapeaux nationaux (plier les couleurs). Il pose toutes sortes de questions : pourquoi le rouge du petit chaperon, pourquoi le chat noir est-il associé aux sorcières et au diable, pourquoi la crainte du vert, pourquoi le vert est-il plus apprécié en Allemagne qu'en France, pourquoi a-t-il une aussi mauvaise réputation ? Et le violet, couleur traitre ? Pourquoi le bleu est-il partout la couleur préférée, dans tous les pays, dans toutes les classes d'âge, pour les femmes comme pour les hommes ? Et les couleurs des chevaux à la terminologie si particulière...
"Parler des mots sans les montrer", Michel Pastoureau y réussit puisque son livre est sans aucune illustration, les mots y suffisent : "les couleurs sont d'abord des concepts, des idées, des catégories intellectuelles", affirme-t-il, évoquant l'arrivée des couleurs et d'un vocabulaire flou dans les catalogues (années 1950).
Pour de nombreux médias, le passage du noir et blanc à la couleur fut une étape importante sinon un tournant de leur évolution, qu'il s'agisse du cinéma, de la photo, des livres et de la presse ou de la télévision. En quoi cette étape fut-elle si importante ? Que change-t-elle à l'expérience des médias ? Nous n'avons pas de réponse à cette question : on considère que la couleur est un progrès, que cela va de soi, ce que contestent certains photographes et cinéastes, ou auteurs de BD. Mais ce n'est pas le propos de Michel Pastoureau, il ne fait que l'effleurer, pourtant il aurait sans doute beaucoup à nous dire sur le sujet (prochain ouvrage ?).
Voir aussi : sur un livre de Frédérique Toudoire-Surlapierre, Colorado, Littérature et médias : anthropologie des couleurs.
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Au-delà de l’intelligence et de la limpidité de la pensée de Pastoureau, c’est la révolution copernicienne du regard en art qu’il a amorcée, notamment avec son essai "Noir : Histoire d’une couleur", qui est extraordinaire (amorcée ou suivie, d’ailleurs ? Pastoureau devance-t-il Soulages ou, est-ce le contraire ? Leur contemporanéité est-elle le signe d’une obsession générationnelle?).
RépondreSupprimerAvant la publication de cet opus, la théorie chromatique enseignée à quiconque pratiquait la peinture était que le noir et le blanc n’étaient pas des couleurs. Il a inversé la donne. Avant, on les envisageait comme des ensembles vides qui bouclaient extérieurement le spectre chromatique. Avec Pastoureau, elles se sont intégrées à la sphère colorée. Cet entêtement millénaire d’exclusion artistique révèle un impensé étrange de la représentation en occident. Hors du champ chromatique, le noir et le blanc sont incorruptibles (les vêtements noirs étaient, au 15e siècle, dévolus aux nobles ; le blanc était un signe de pureté virginale, notamment). La couleur, c’est en fait la manifestation de quelque chose de l’être qui se délite et dont la mort divertit l’œil…
nicolasbauche206