lundi 29 juillet 2019

Quand des philosophes imaginent les villes


Michel Eltchaninoff, La ville rêvée des philosophes, Paris, Philosophie Magazine EDITEUR, Paris, 191 p., 25 €.

Michel Eltchaninoff est homme de média et philosophe ; il co-dirige la rédaction de Philosophie Magazine (diffusion totale payée, selon l'ACPM-OJD, 36 482 exemplaires en décembre 2018).

L'ouvrage, issu de la rencontre de La Fabrique de la Cité (un think tank) et de philosophes professionnels est composé de six chapitres, chacun d'entre eux cumulant quatre parties :
  • la partie première, "perspective", donne le ton, 
  • la seconde partie fait dialoguer un spécialiste de la ville (urbaniste) et un philosophe professionnel (qui enseigne)
  • cela précède un ensemble de citations (de Platon à Claude Lévi-Strauss), plus ou moins longues, consacrées à la cité par des philosophes connus, plus ou moins modernes
  • et le chapitre se termine par un chapitre (trop) court (2 pages) concernant une oeuvre cinématographique (Jacques Tati, Fritz Lang, Jim Jarmush, Byron Howar et Rich Moore, Ridley Scott, et Jia Zhankhe.)
Le philosophe a voulu regrouper dans ce volume des idées de la ville propres "à embrasser la complexité", telles que les voyaient et les voient, les philosophes d'hier, er d'aujourd'hui encore. Ce livre est une collection d'idées, de pensées, de remarques venant de philosophes les plus anciens et les plus récents centrées autour de débats sur "l'extension du domaine de la ville", sur la notion de "smart city", sur le vivant, l'espace et le vide, sur le despotisme moderne (à propos de Singapour)...
Des philosophes commentent la ville : "la piétonisation des voies sur berges", le réaménagement de la place de la République (Paris), les aménagements de la ville de Lisbonne, le quartier  Hammarby (Stockholm), les coulées vertes (New York, Paris, Séoul) : mondes de "l'homo citadinus".
Jean-Jacuqes Rousseau ne voyait dans les grandes villes que des occasions pour les humains de s'y perdre : "l"homme est de tous les animaux celui qui peut vivre le moins en troupeaux", dira-t-il. Mais pourtant, l'homme vit dans les villes. Mais où commence et où finit une ville ? Ne faut-il pas laisser la ville se développer à sa manière, improbable et incertaine, plutôt Aristote que Platon ? Villes intelligentes ? Pas si sûr, calculables peut-être, mais "la capacité de bordel de l'espèce humaine outrepasse très largement les possibilités de calculabilité", observe Antoine Picon !
Ce livre est comme un flânerie incertaine dans les villes, villes de tous les temps, de tous les moments, villes de tous les films ("Playtime", de Jacques Tati ou "Metropolis" de Fritz Lang, ou encore la ville chinoise de Jia Zhankhe...).

Comment bâtir un discours sur la jungle urbaine d'aujourd'hui, jungle que construisent l'ingénieur et l'architecte guidés par des élus et des urbanistes ? "Plutôt mettre les idées en chantier que bâtir des châteaux en Espagne", met en garde Michel Elchaninoff qui vante dans la ville "l'indiscipline de ses habitants" ! Ce livre est un débat, un vaste mélange, organisé, de rencontres de spécialistes, d'expériences, de villes donc : il faudra le remettre en chantier chaque année pour entendre les nouvelles idées, les nouvelles menaces et voir naître et mourir de nouvelles villes.
Voici en tout cas un livre utile, à parcourir régulièrement pour entendre un philosophe ou un urbaniste dire ce qu'il voient des villes, comment ils les voient et ce qu'elles deviennent... puisqu'il est certain que l'on ne comprend pas comment vivent les villes, comment elles naissent et meurent.

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