vendredi 31 juillet 2020

Spinoza : une nouvelle édition bilingue de L'éthique


Spinoza, Oeuvres IV, Ethica, Ethique, Paris, PUF, 2020, 690 p.. Edition bilingue. Glossaire, bibliographie.
Annexes :
- Fabrice Audié, Les exemples mathématiques de l'Ethique
- André Charrak, Sur l'abrégé de physique de l'Ethique
- Pierre-François Moreau, Tableau de la vie affective

Texte établi par Fokke Akkerman et Piet Steenbakkers
Traduction par Pierre-François Moreau

Voici enfin, pour quelques bonnes dizaines d'années au moins, une nouvelle édition de l'oeuvre majeure de Spinoza. La plupart d'entre nous n'avons d'abord connu pour l'Ethique, que l'édition de Charles Appuhn (1909 et 1934), d'autres, plus jeunes, celle de Roland Caillois (en Pléiade), puis celle Bernard Pautrat (au Seuil). Désormais, il n'y en aura plus qu'une seule, celle de Pierre-François Moreau.
Celle-ci tire en effet profit de la découverte récente (2010), dans la Biblothèque apostolique du Vatican, de 133 feuillets manuscrits de l'oeuvre de Spinoza. Le travail aujourd'hui publié est le résultat de cette découverte qui redresse parfois les Opera posthuma. Les nouveaux lecteurs auront donc affaire à une édition très propre ; les anciens lecteurs, passé un moment de nostalgie, y recopieront leurs notes...

dimanche 19 juillet 2020

Berbères juifs. Le judaïsme dans le Maghreb


Julien Cohen-Lacassagne, Berbères juifs. L'émergence du monothéisme en Afrique du Nord, Préface de Shlomo Sand, Paris, La fabrique éditions, 2020, 199 p., Glossaire, Bibliogr., 14 €.

Ce livre met en question le sionisme, idée selon laquelle Israël
serait le pays du retour de Juifs qui en furent chassés autrefois, et furent dispersés de par le vaste monde. En réalité, souligne Shlomo Sand, dans sa préface, il venaient de nombreux endroits, entre autres : de l'Empire khazar sur les rives de la Volga et du Don (aujourd'hui en Russie), de l'Adiabène (actuel Kurdistan), de Himyar (le Yemen d'aujourd'hui), de Beta - Israël (en Ethiopie), d'Afrique du Nord, sous la conduite de leur reine, Dihya al-Kahina. 
Donc les Juifs du Maghreb ne seraient pas des Juifs chassés d'Israël mais des populations diverses provenant de diverses sources, mais surtout d'abord de nombreux Berbères convertis.

Au terme d'une démonstration historique, l'auteur conclut que le Maghreb est "à la  fois berbère et arabe, et que ces deux univers ne peuvent et ne doivent pas s'opposer". Selon lui, le triomphe des Arabes, c'est surtout le triomphe de la langue arabe qui a été plus ou moins imposée en Afrique du Nord. On notera toutefois que cette domination de la langue arabe, après celle de la langue française, est aussi le résultat d'une domination militaire et administrative. Si "les identités s'empilent bien plus qu'elles ne se substituent les unes autres", les pouvoirs politiques (dont l'ancien pouvoir colonial) peuvent jouer toutefois un rôle majeur dans ces opérations d'addition. 
Ce livre est intéressant par les problèmes qu'il pose et par les solutions historiques qu'il envisage ; toutefois, les engagements de l'auteur, professeur d'histoire-géographie à Alger, semblent parfois orienter ses conclusions. Enfin, là n'est pas l'intérêt de ce livre, qui se situe surtout dans les argumentations que mobilise l'auteur. La principale conclusion reste que l'on attend des thèses sur la question, thèses d'historiens, désencombrées des points de vue coloniaux de toutes sortes, sur les monothéismes au Maghreb.