dimanche 8 février 2015

RATP : quand la publicité prend le métro et le bus



"Quand la pub nous transporte. 65 ans de publicité de la RATP", Paris, Cherche Midi, 2014, chronologie des campagnes, 160 p.

L'essentiel du livre est dans les photos, dans les reproductions des affiches des campagnes publicitaires. Le montage y a ajouté des photos du métro, des citations des commentaires et des explications.

Livre d'histoire d'un réseau social ancien qui couvre toute la région parisienne, répète insensiblement ses messages au cours de la semaine, touche toutes les catégories sociales actives. A la différence d'autres médias, la publicité, ici, ne dérange pas, n'interrompt pas. Elle interpelle en silence, tout en clins d'œil, humour et tendresse...

"Le métro, c'est Paris", c'est la ville, c'est la vie. Et Paris, c'est le métro. Bien plus que les monuments historiques ou les grandes places commerciales, le métro décline l'identité d'une société, de ses manières de vivre la ville, la politesse (cfTokyo). Pour les touristes, étrangers ou provinciaux, le métro, le bus, c'est le moment formidable où ils ne sont plus des touristes mais des parisiens parmi la foule des parisiens les plus actifs : au lieu d'être prisonniers de cars qui les baladent d'embouteillage en sites dits "touristiques", ils vivent alors Paris en direct.

Le métro et les bus "irriguent" la vie parisienne, souligne Isabelle Ockrent, "directrice de la communication et de la marque RATP". Le réseau est dense, ancien, donc bien intégré dans la ville quotidienne. Son graphe est aussi un habitus car ses utilisateurs sont fidèles et réguliers.
La RATP est une marque aussi. A ce titre, elle connote plutôt qu'elle ne dénote : RATP veut dire Paris et métro. C'est la marque de Paris. Peu de réseaux de transports ont une telle image, qu'exploitent les campagnes publicitaires, image poétique, romantique des rencontres, sérendipité ("un bout de chemin ensemble"), image d'efficacité (ponctualité garantie), image sociale (travail, école). Le nom des stations est ancré dans les mots de la marque : ainsi Louis Aragon, pour suggérer Paris évoque-il "Une chanson qu'on dit sous le métro Barbès // Et qui change à l'Etoile et descend à Jasmin" (Le paysan de Paris chante, 1943). Aujourd'hui, les Parisiens se définissent par leurs lignes de bus et de métro : socio-démo-métro ! Données élémentaires de la vie parisienne !
Les campagnes que l'ouvrage a sélectionnées mettent en avant les nouveaux services mais aussi le rôle de ces transports en commun dans la vie sociale, dans l'économie : on s'y moque des malheureux automobilistes chèrement embouteillés, on rappelle que la RATP lutte contre la pollution de l'eau et de l'air. La RATP, deuxième voiture ? Pourquoi pas la première, voire la seule ? Belle campagne, cause commune de tous les habitants de l'Ile-de-France, et qui pourrait aller plus loin...

Aujourd'hui, les applis, les données recueillies vont changer, enrichir le service de transport et la capacité de communication de la marque RATP avec ses clients, d'autant que l'interactivité est au bout des écrans et des smartphones.

Livre d'histoire, d'histoire du métro et d'histoire de la publicité, publicité pour faire valoir et insérer les transports en commun dans la culture urbaine de l'Ile-de-France. De campagnes en campagnes, affleurent les problèmes : pollution, extension de la banlieue, incivilité (contre un usage bruyant du portable dans les transports en commun, tout reste à faire ! cf. la couverture de l'ouvrage. Comment évalue-t-on l'impact d'une telle campagne ?).
Les reproductions d'affiches et photos en noir et blanc parlent avec nostalgie d'une ville moins peuplée, moins stressante, nostalgie des places au nom de fleurs, des excursions... Tendresse urbaine : comment la retrouver ?

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