mardi 3 août 2010

L'iPhone et l'amour du musée

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L'iPhone investit le musée. L'appli iPhone de l'exposition prend la place du guide de l'exposition, invitant à une visite linéarisée où l'on enchaîne les "tableaux d'une exposition" comme dans une visite guidée.

Dans le musée : invitation à télécharger et utiliser l'appli 
Pour l'exposition "Edvard Munch ou l'Anti-Cri" à la Pinacothèque de Paris : l'appli est vendue 3,99 €, chaque tableau (numéroté) est commenté.
Remarquable outil qui complète et enrichit la visite, au même titre que le le catalogue (qui n'est pas encore disponible en livre électronique). Grâce à cette appli, la visite peut être préparée, sauvegardée, approfondie, assurant plus aisément "la présence, dans [notre] vie, de ce qui devrait appartenir à la mort" (Malraux). Le numérique réinvente le "musée imaginaire"

D'autres fonctionnalités issues des transformations numériques se dessinent, concernant la gestion et l'organisation du musée "réel" et de ses publics :
Copie d'écran d'iPhone

  • Connaître les audiences, les déplacements, le temps d'arrêt dans chaque pièce, devant chaque tableau, gérer les files d'attente : tout cela que peut apporter le numérique au musée (Majority Report). Dans un musée, on observe comme dans tout espace social,  une trajectographie des visites, une économie de l'attention, une notion de durée (répétition, revisites), etc. L'optimisation de l'espace et du temps muséaux permet d'améliorer le confort de la visite et de rendre compte de l'attention portée aux partenaires de l'exposition (ici : FNAC, Media Transports, Paris Match, La Tribune, LCI, France Info).
Mais, ce que ne changera pas le numérique, ou à peine, c'est "l'amour de l'art". L'école, l'université et la famille en détiennent les clefs, seules capables de rompre la "reproduction" et l'exclusion de "l'amour de l'art". L'effet de la distance géographique, si discriminante dans les pratiques culturelles, peut être atténué par le numérique mis à portée de tous, plus que ne pouvait le réaliser le livre d'art. 

Références
Pierre Bourdieu, Alain Darbel, Dominique Schnapper, L'amour de l'art. Les musées d'art européen et leur public, Paris, Minuit
André Malraux, Le Musée imaginaire, Paris, Gallimard
Chloé Tavan, "Les pratiques culturelles. Le rôle des habitudes prises dans l'enfance", INSEE Première, N°883, février 2003.
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1 commentaire:

  1. Cette nouvelle application semble être un outil intéressant pour une visite de musée ou d'exposition. Bien que son prix soit élevé, elle reste tout de même bien moins coûteuse qu'un véritable guide, même si celui-ci présente l'avantage de répondre aux questions en direct.
    Ce type d'application délivre des informations fiables si elle est proposée par le musée lui-même, et permet aux établissements d'économiser sur un poste important: les salaires des guides et l'achat des casques audios, puisque le support devient le téléphone des visiteurs. Autre point pertinent relevé par l'article pour le musée: la trajectographie de chaque visiteur peut être repértoriée.
    Je pense que le numérique à en effet ses limites dans le domaine de l'art, mais selon moi il peut contribuer à approfondir cet amour de l'art. Il efface effectivement les barrières géographiques de la culture, permettant à chacun de s'instruire sur l'art à l'échelle mondiale. Il est vrai que l'art est un bien tangible, que le numérique aura toutes les peines du monde à reproduire, mais il permet de faire voyager la connaissance de cet art, et par conséquent mener les gens à aimer l'art autrement. Certaines personnes ne pourront ou ne voudront pas effectuer de visites de musées, et n'attachent pas d'importance au fait de contempler une véritable oeuvre d'art. Cela ne signifie pas pour autant qu'elles ne trouveront pas de plaisir à utiliser le numérique pour se cultiver sur cet oeuvre et apprécier de l'observer "autrement". Le numérique ne peut pas remplacer le plaisir tangible de l'art, mais il peut devenir une source de connaissance différente.

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